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Les services juridiques envisagés sous l’angle commercial

La profession a fait des progrès, mais de nombreux juristes doivent encore apprendre à devenir des gestionnaires de projet par défaut.

Gantt chart

Dans le marché concurrentiel contemporain, il est plus important que jamais pour les praticiens de savoir comment fixer la portée et le calendrier d’un projet, estimer son coût de manière réaliste, puis gérer sa réalisation.

Mais, possèdent-ils les compétences pour tout faire efficacement?

Cela dépend de leur connaissance de l’utilisation des principes fondamentaux de la gestion de projet (GP) dans la gestion de leurs dossiers. Les grands cabinets ont recours à la GP avec succès depuis les dix dernières années, reconnaissant que les sociétés qui sont leurs clients exigent l’application des principes de la GP dès de l’ouverture d’un dossier de grande envergure.

Christiane Saad, directrice générale du Programme de pratique du droit (PPD) à l’Université d’Ottawa, s’intéresse notamment à l’enseignement de l’importance de la gestion de projet aux nouveaux juristes. Le PPD offre aux diplômés des facultés de droit canadiennes une nouvelle voie pour devenir juriste en Ontario.

L’acquisition de compétences en gestion de projet peut passer par les voies évidentes de l’obtention d’un certificat de spécialiste en gestion de projet décerné par le Project Management Institute, par exemple. Cependant, il est essentiel que les juristes comprennent, à tout le moins, les règles de base de la gestion de projet, dit Christiane Saad. Les programmes d’étude du PPD ont fourni une vue d’ensemble des concepts de base de la GP depuis trois ans, y compris une séance sur l’analyse du risque juridique. Le Centre d’innovation juridique d’Ottawa a récemment tenu un « innovation hackathon » qui comportait un atelier sur les éléments fondamentaux de la gestion de projet et la manière de présenter un projet avec succès.

« Je pense que c’est primordial. Il y a, de nos jours, des associés principaux qui ont de l’expérience quant au modèle d’affaires, dit madame Saad. Cependant, nous constatons qu’un changement est nécessaire et la gestion de projet est l’un des outils qui peuvent offrir une meilleure approche aux nouveaux juristes et professionnels du droit qui arrivent sur le marché. »

Les juristes devraient être des gestionnaires de projet par défaut, ajoute-t-elle, et apprendre à se demander à quel point leurs dossiers sont bien gérés. Les clients choisissent fréquemment un juriste chevronné pour traiter leur dossier, en raison de ses vastes connaissances, « mais cette personne pourrait aussi être la pire gestionnaire de projet, dit madame Saad. La personne la mieux placée pour le faire pourrait très bien être le parajuriste ou l’adjoint, en somme quelqu’un qui possède les compétences et les capacités nécessaires. »

La gestion de projet juridique a fait son apparition à la fin de la dernière crise financière, en 2008, mais n’a vraiment été adoptée que dans les grands cabinets du Royaume-Uni, avant de s’implanter aux États-Unis et au Canada. De nos jours, des cabinets comme Norton Rose Fulbright Canada LLP / s.e.n.c.r.l., s.r.l. ont des équipes pluridisciplinaires de gestion de projet qui incluent des experts en détermination du prix, des membres de la section des finances et des parajuristes qui gèrent l’intégralité du portefeuille de certains clients.

Dans son essence, la gestion de projet recouvre la planification, l’établissement de stratégies, la détermination des coûts, le suivi et la rédaction de rapports concernant le travail juridique.

« La gestion de projet juridique aide le cabinet à gérer le portefeuille et les dossiers des clients grâce à une planification anticipée et à des rapports transparents », dit Emily Wesson, gestionnaire de projet principale chez Norton Rose Fulbright.

Selon elle, il importe que les nouveaux juristes qui en sont à leur début dans la profession comprennent que la gestion du travail en tenant compte des buts et objectifs du client peut les aider à prospérer. La gestion de projet peut contribuer à voir les choses sous cet angle.

« Les jeunes juristes réussiront mieux s’ils ont un état d’esprit commercial et comprennent qu’il s’agit d’une entreprise », dit-elle.

Sur les quatre gestionnaires de projet chez Norton Rose au Canada, deux exerçaient auparavant le droit. Les deux autres étaient gestionnaires de projet dans le monde des affaires. La plupart des membres de l’équipe ont une formation juridique.

La gestion de projet permet aux professionnels d’être plus proactifs au lieu d’être toujours sur le qui-vive pour corriger le tir une fois que les choses semblent avoir déraillé.

« Avec certains types de travaux juridiques, il est possible de prévoir avec une bonne dose de certitude qu’elle va en être l’issue, par exemple l’enregistrement d’une marque de commerce, une cession ou certaines sortes de tâches financières ayant le même échéancier », dit Peter Dombkins, directeur de NewLaw dans le cabinet PWC.

Utiliser les points forts d’autres professions

Le droit est la deuxième carrière de Christiane Saad. Elle a une formation en gestion de projet et en restructuration des processus. Elle dit avoir également été inspirée par l’ouvrage intitulé Legal Project Management in One Hour for Lawyers.

« Vous pouvez envisager les pratiques exemplaires, mais vous devez aussi être ouvert aux nouvelles façons de faire les choses. Au fond, il s’agit d’avoir une gamme d’options et de savoir quand les utiliser et quand vous adapter en fonction des circonstances », dit-elle.

Elle commence avec les cinq étapes traditionnelles d’une gestion de projet juridique efficace, selon le Project Management Institute :

  • Étape 1 : Début de la conception : besoins du client, objectifs (SMART = spécifique, mesurable, atteignable, réaliste et temporel), contraintes, portée, engagement/entente.
  • Étape 2 : Définition et planification : structure détaillée du travail, budget, calendrier, mise en place d’une équipe, analyse du risque.
  • Étape 3 : Lancement/exécution : surveillance et contrôle : gestion des communications, gestion du changement et risques.
  • Étape 4 : Rendement et surveillance/contrôle : gestion des composantes des étapes 2 et 3.
  • Étape 5 : Clôture du projet : analyse une fois le projet terminé et examen en vue d’une amélioration du processus.

Bien que le marché propose de nombreux logiciels pour aider la gestion de projet juridique, des outils comme Excel et Microsoft Word peuvent fréquemment être de bons outils pour les cabinets qui se lancent pour la première fois dans la gestion de projet.