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Un programme de mentorat au féminin pour étudiantes en droit

Andrea Kruger lance un programme de mentorat qui jumelle des femmes leaders avec de jeunes juristes en herbe.

Photographie d’Andrea Kruger, une diplômée du programme de droit de l’Université de
Photographie d’Andrea Kruger, une diplômée du programme de droit de l’Université de

Andrea Kruger, diplômée de la faculté de droit de l’Université de Montréal, lance ce printemps un programme de mentorat qui jumelle des femmes chefs de file avec de jeunes juristes en herbe afin d’aider ces dernières à surmonter les défis particuliers auxquels elles sont confrontées dans la profession juridique. ABC National l’a rencontrée pour discuter de ce qui permet à un programme de mentorat de se distinguer.

ABC Nationale : D’où vous est venue cette idée de lancer ce programme?

Andrea Kruger : Pendant mes années à la faculté de droit, je me posais beaucoup de questions sur la profession, sur la position des femmes dans la profession et sur la façon dont nous pouvons aborder les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes à un moment ou un autre de leur vie. J’avais l’impression de n’avoir jamais vraiment pu compter sur une personne d’expérience à qui poser ces questions. Ainsi, je voulais aider des gens qui se trouvaient dans ma situation en créant une plate-forme où elles pourraient s’informer dans une ambiance accommodante, un endroit sûr où il serait possible de parler ouvertement, sans crainte de jugements. Selon ce que mes recherches m’ont permis de constater, bien que les choses avancent, les femmes manquent indéniablement de soutien dans les universités en matière de mentorat.

N : Pourquoi un programme de mentorat s’adressant particulièrement aux femmes?

AK : Il existe un gouffre entre le nombre de femmes qui se lancent dans une carrière professionnelle et le nombre de femmes qui décident de rester dans la profession ou qui obtiennent un poste de cadre. C’est ce que nous appelons le « tuyau percé ». Une des façons d’aborder ce problème consiste à « colmater » la fuite par le biais de mentorats qui offrent aux femmes des occasions de se bâtir du capital social, d’élargir leurs horizons, d’attirer l’attention sur les comportements discriminatoires tout en y résistant, d’explorer les politiques organisationnelles de façon plus stratégique et de se rassembler pour échanger sur les enjeux les plus importants. La capacité à réellement discuter d’enjeux de genre avec une personne d’expérience permet, à mon avis, d’avoir accès à des conseils plus judicieux. Notre programme féminin, tout comme sa conception, est vraiment propice à un dialogue ouvert et dépourvu de jugements sur des enjeux délicats qu’il est parfois difficile ou pénible à aborder dans un autre contexte ou dans un cadre plus formel.

N : Comment vous y prenez-vous pour jumeler des femmes?

AK : Nous lançons une campagne au sein de mon alma mater, l’Université de Montréal, dans le but de recruter des étudiantes désireuses d’y participer. Il leur suffit de visiter notre site Web, puis de remplir des formulaires expliquant les raisons de leur intérêt ainsi que le genre de personne avec laquelle elles aimeraient être jumelées. Nous les jumelons ensuite avec une mentore qui, selon nous, correspond à leur profil. Puis, il leur revient d’organiser leur première rencontre et de convenir des conditions de leur relation.

N : Qu’en est-il des mentores? Quels sont leurs antécédents?

AK : Beaucoup d’étudiantes nous ont indiqué que l’un des principaux problèmes du mentorat est qu’il y a un manque de diversité. Nous voulions donc nous assurer que nos mentores étaient issues de divers groupes culturels. Même si une étudiante n’est pas jumelée avec quelqu’un qui a exactement les mêmes antécédents culturels qu’elle, plusieurs groupes peuvent partager les mêmes enjeux. Il doit également y avoir de la diversité par rapport au milieu de travail des mentores. Certaines étudiantes ne veulent pas nécessairement poursuivre leur carrière dans la pratique privée et envisagent d’autres plans de carrière. Ainsi, nous avons tenté d’approcher des femmes issues du plus large éventail possible de milieux professionnels. Nous avons communiqué avec des avocates de cabinets privées, des conseillères juridiques d’entreprise, des employées du gouvernement, des activistes et des femmes qui ont utilisé leur expertise juridique pour faire carrière dans des domaines juridiques connexes. L’objectif est de créer des liens entre des professionnelles du droit chevronnées et de futures professionnelles afin de guider ces dernières tout au long de leur carrière, particulièrement lorsque vient le temps de prendre des décisions importantes, notamment à l’université, au moment de découvrir le paysage juridique et la place que nous souhaitons y occuper.

N : Personnellement, avez-vous déjà eu des mentors?

AK : Oui, j’en ai eu deux. Un homme et une femme. Ces deux expériences ont été très différentes l’une de l’autre. Et il ne s’agit pas d’une critique à l’endroit de l’homme qui a été mon mentor, qui m’a offert un soutien indéfectible et m’a prodigué de savants conseils. Toutefois, j’ai pu poser certaines questions à ma mentore que je n’ai pas été en mesure de poser à mon mentor. Ce n’est pas parce que je ne voulais pas lui demander, mais simplement parce qu’il ne savait pas ou ne possédait pas d’expérience personnelle. Même s’il pouvait faire preuve de beaucoup de compassion et de compréhension, les conseils qu’il me prodiguait ne se fondaient pas sur son expérience personnelle. Et cet aspect à une grande incidence sur le mentorat.