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Comment un non-juriste peut vous aider à faire croître votre cabinet

Quand j’ai d’abord pensé à ouvrir mon propre cabinet il y a cinq ans, je me suis posée quelques questions assez évidentes, allant de « Quel modèle de service allait préférer les clients? » à « Quel logiciel de gestion me conviendrait le mieux? ».

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Une question m’a fait particulièrement réfléchir. « Que me manque-t-il pour réussir? » J’avais une bonne expérience en droit, mais j’étais novice en gestion d’entreprise. ­Pourrais-je apprendre tout ce qui était nécessaire? Probablement. Est-ce que je pourrais me faciliter la vie en faisait appel à un entrepreneur d’expérience? Sans aucun doute.

Ce n’était toutefois pas si simple : rares sont les entrepreneurs de talent qui cherchent un poste de second violon. Ils vont généralement préférer investir leur temps et leur argent dans un projet qui leur procurera un revenu à la hauteur de leurs efforts, un pouvoir décisionnel équitable et le plaisir d’être son propre patron.

J’ai donc recruté mon conjoint, le seul homme d’affaires que je connaissais qui était prêt à accomplir cet acte de foi. C’est ainsi que nous sommes devenus, dans les faits une « structure d’entreprise alternative » (SEA).

Vous avez bien lu : je dirige un cabinet d’avocats en plein essor avec l’aide d’un non-juriste. Non, le ciel ne nous est pas tombé sur la tête, pas plus que nous avons compromis l’indépendance de nos avocats ou compromis nos standards professionnels.

Comment est-ce possible? C’est simple : tous nos employés ont à cœur le succès du cabinet. Cela inclut évidemment mon conjoint, qui comprend très bien l’importance de nos obligations professionnelles pour notre survie de notre entreprise. La qualité et l’intégrité sont indispensables à notre existence.

J’irai même jusqu’à dire que sans notre non-juriste, nous n’aurions pas eu la même croissance et nous n’aurions certainement pas su être aussi audacieux, innovateurs et différents. Notre non-juriste se fait la voix de nos clients (également non-juristes). Libre des idées préconçues des avocats, il nous incite constamment – dans le respect bien sûr – à revoir nos façons de communiquer et de travailler. La créativité et l’innovation naissent souvent d’une perspective différente.

En poussant plus loin cette réflexion, je peux certainement voir le jour où nous aurions besoin d’un autre non-juriste pour poursuivre notre croissance. Par contre, ­comme la polygamie ne m’intéresse pas, cette personne ne pourrait jamais aspirer à être plus qu’un employé...

Abstraction faite de mon cas ­personnel, je crois que nous avons tous le devoir, en tant que membres d’une profession ­autoréglementée, de nous demander si le seul moyen de protéger notre intégrité consiste à restreindre la propriété ou le contrôle dans nos cabinets.

Selon moi, il nous faudrait d’abord évaluer i) quelles sont les autres options et ii) le coût qu’elles représentent par rapport à notre ­objectif, soit trouver la meilleure façon de servir et de protéger le public.

D’autres professions et juridictions ont déjà recours à une multitude d’options (jetez un coup d’oeil par exemple aux ingénieurs en Alberta). Avons-nous réellement étudié toutes les possibilités pour une réforme de nos règles? Se contenter de décider si les structures d’entreprise alternatives devraient être permises ou non limite indûment le débat.

Les règles actuelles limitant la concurrence au sein d’un même groupe de professionnels empêchent une saine collaboration avec d’autres professionnelles, un terrain fertile pour l’éclosion d’une pensée de groupe. Rien pour favoriser l’innovation, et ce n’est certainement pas dans l’intérêt du public ou de la profession.

Alors qu’en est-il des autres options? ­Beaucoup a été dit sur les risques des SEA. Je ne peux parler qu’en mon nom, mais je suis fière de dire que notre expérience a été positive sur toute la ligne : demandez à nos avocats et à nos clients!

L’accès à la justice est en crise au Canada et le secteur juridique traverse des difficultés sans précédent. Pouvons-nous vraiment nous payer le luxe de ne pas poursuivre notre réflexion? Le public ne profiterait-il pas d’une concurrence, d’une collaboration et d’une innovation accrues? À la Conférence juridique de l’ABC de Calgary, cet été, la juge en chef Beverley McLachlin a été claire : la profession doit « innover ou mourir ». Nous devons agir avant que le public satisfasse ses besoins autrement (le Dr Google n’est jamais loin).
Ce coût-là, est-il plus acceptable?

Dans l’intérêt de notre profession, nous nous devons d’élaborer une solution qui protègera réellement l’intérêt du public, au lieu d’agir par protectionnisme.